«Les Suisses avaient l’habitude de se qualifier de pionniers dans la politique des drogues, mais ce n’est plus totalement juste», s’exclame Jean-Félix Savary, secrétaire général du Groupement romand d’études des addictions (GREA). Cette réputation est basée sur la politique des quatre piliers, une vision pragmatique qui a permis la prescription contrôlée d’héroïne et l’ouverture de centres d’injection. Depuis les années 1980, les choses ont changé: l’héroïne n’a pas disparu, mais d’autres produits sont arrivés.
De nouvelles substances psychoactives ne cessent d’être développées. Les autorités ont une liste des drogues prohibées, mais des laboratoires clandestins détournent les interdictions en modifiant une molécule de leur produit pour qu’il ne figure pas dans l’inventaire. «Le marché noir a toujours quelques coups d’avance sur notre système répressif», résume Jean-Félix Savary. Pour lui, la conclusion est claire: «Face à de nouveaux produits, il faut apporter de nouvelles réponses.»Lesquelles? Dans les milieux de la prévention, l’analyse de drogues est considérée comme l’une des pistes intéressantes. Le drug checking, qui intéresse Genève, permet aux consommateurs de vérifier à l’avance la composition d’une pilule. «Ainsi, nous protégeons la santé des consommateurs et nous pouvons entrer en contact avec eux pour les aider», plaide Jean-Félix Savary.
De tels systèmes existent à Berne et à Zurich. Un essai pilote est aussi mené à Bâle. Ces projets sont toutefois critiqués, notamment par l’UDC, qui y voit une tolérance face à la drogue. Alexander Bücheli, membre de Safer Nightlife Suisse, défend un avis diamétralement opposé: «L’idéal pour la réduction des risques serait d’en développer davantage dans les grandes villes et dans les régions.» Le Zurichois cite en exemple la Hollande, où un réseau étendu existe déjà. Jean-Félix Savary, lui, évoque «un grand dynamisme» en France. L’analyse de drogues y a débuté en 1999 sous l’égide de l’ONG Médecins du monde. Pour des raisons légales et financières, la méthode utilisée est toutefois moins performante que celle employée en Suisse. Trois centres de Médecins du monde (Paris, Marseille et Toulouse) offrent ce service d’analyse et des structures régionales partenaires leur transmettent des substances.
«Ce dispositif global d’analyse de drogues permet aussi d’identifier de nouvelles molécules», précise Grégory Pfau, de Médecins du monde. La gestion de ces projets est peu à peu transmise aux associations qui soutiennent les consommateurs. Une vision du bas vers le haut qui rappelle à Jean-Félix Savary ce que la Suisse a connu dans les années 1980: «A l’époque, nous avons testé des projets pilotes. Ils ont finalement été repris dans la loi.» (24 heures)
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